M – 15 (juin) : la naissance du projet M – Partie 1
Je le disais dans ma chronique précédente, quand Monsieur Pragmatique et moi avons emménagé ensemble, c’était la première fois que nous vivions sous le même toit de façon durable. C’était une grand étape, mais uniquement la première d’un plan d’avenir déjà assez bien défini.
Lors de notre rencontre, je n’envisageais pas de me marier un jour (surtout pour toute la partie engagement légal que ça implique), même si j’avais envie de faire une grande fête avec mes proches pour « annoncer » avoir décidé de faire un bout de route avec une personne en particulier, qui serait idéalement aussi le père de mes enfants. C’était une vision très égocentrique et défensive, où je pensais qu’on pouvait fonder un foyer sans s’engager et prendre le risque d’être blessé par l’autre…
Et il a suffi à Monsieur Pragmatique d’à peine quelques années pour que j’accepte l’idée, sans remarquer le changement de paradigme dans mon esprit quand, un jour, il m’a demandé où on ferait notre lune de miel (sans ajouter un « si on se marie un jour », le fourbe !)… Et donc le temps a passé, avec cette idée restée à l’arrière de nos têtes, celle qu’on se marierait un jour…
Notre plan d’avenir très précis, mais pourtant assez flou
En mai 2014, quand j’ai rejoint, en Suisse alémanique, Monsieur Pragmatique qui venait de commencer un nouvel emploi après plusieurs mois de recherche, je m’envolais du nid familial, une licence toute fraîche en poche et presque sans économies.
J’avais comme projet de faire un master en génie logiciel à Zurich, mais il était inconcevable pour nous deux que je dépende de son salaire pendant cette période, même s’il était prêt à me soutenir en cas de difficultés. Nous avions fait quelques projections avant de nous lancer dans cette aventure de cohabitation, et nous avions donc prévu que je parte immédiatement en quête d’un premier emploi dans la région, pour une durée d’environ deux ans, afin de gagner de l’expérience professionnelle tout en mettant de côté l’équivalent de dix-huit mois de « rente » en prévision du master désiré. De plus, la reprise d’études en septembre 2016 m’aurait permis de terminer à peu près en même temps que la formation complémentaire de mon chéri.
Et après ça, une fois que j’aurais de nouveau trouvé un emploi post-master, et que mon chéri aurait pu profiter des avantages liés à son nouveau diplôme – afin de tous deux nous établir dans une situation économique et professionnelle stable – nous prévoyions de « passer à la suite », c’est-à-dire de devenir parents.
Nous glissions déjà dangereusement sur cette pente, mais sans nous sentir encore prêts à être complètement responsables d’un petit être fragile…
Pourquoi autant de précipitation ? Tout simplement parce que Monsieur Pragmatique tenait à devenir papa avant son fatidique trentième anniversaire, en novembre 2018 ! Nous nous trouvions face à un planning un peu serré, puisque pour accoucher avant novembre 2018, il aurait fallu que je tombe enceinte à peu près au moment de mes derniers examens ! Et c’était sans compter que j’espérais avoir eu le temps de me construire un début de carrière prometteur avant de devenir maman…
Mais nous étions jeunes, fous, amoureux, et tous les deux prêts à concéder adapter légèrement nos souhaits en fonction de la situation, quelque part dans ce futur pas encore trop proche. Après tout, si j’étais (fraîchement) enceinte pour le trentième anniversaire de mon chéri, et en poste depuis six à huit mois, nos deux souhaits seraient plus ou moins réalisés, non ?
À ce moment-là, nous planifiions notre mariage plus ou moins pour le début de l’été 2018, histoire de faire les choses « dans l’ordre ». Mais ce n’était rien de très précis, ce plan de mariage, juste une autre borne floue dans un futur vaguement éloigné, qui nous permettait de garder en tête la direction et le rythme selon lesquels nous voulions avancer.
Du chamboulement dans nos projets
La vie a donc suivi son cours. J’ai signé mon premier contrat de travail avant la fin de l’été 2014, et conformément à nos plans, j’ai posé en avril 2016 ma candidature au master de mes rêves.
J’avais d’un côté l’impression d’avoir plus appris que jamais dans ce premier emploi, qui s’était complexifié au fil des mois et qui avait été récompensé par deux promotions. Et d’un autre côté, je savais que de nombreuses connaissances me manquaient encore pour pouvoir poursuivre dans la direction qui m’intéressait vraiment, et que le chemin via une reconversion professionnelle standard serait plus complexe sans le diplôme que je visais. Je jouais donc le tout pour le tout : c’était ce master, ou rien. Et de préférence quand même ce master.
Quitte à voir fondre la quasi totalité de mes économies pour compenser mes frais quotidiens durant ces études, et à me retrouver de nouveau avec un diplôme tout frais et un compte bien vide, avec le risque de devoir vivre au crochet de mon chéri, autant que ce soit pour le cursus que je visais depuis plusieurs années. Dans le cas contraire, j’aurais assez de capital pour me former seule à côté, par exemple, d’un emploi à huitante pour cent. Mais ce genre de scénario était assez flou dans ma tête.
Et quand j’ai reçu la lettre de rejet du bureau des admissions de l’université, j’étais sous le choc. Partagée entre le soulagement de pouvoir déjà me considérer dans une situation économiquement et professionnellement stable, et la déception de voir mon projet s’effondrer, et de n’avoir aucune idée de la façon dont je parviendrais à me réorienter professionnellement vers les domaines qui m’attiraient.
Crédits photo (creative commons) : 12019
Adieu la ligne droite, bonjour le chemin tortueux menant on ne sait où !
L’apparition d’un projet alternatif
À cette nouvelle, la réaction primaire de ma maman, conformément à son légendaire manque de tact, a été d’essayer de me rassurer avec les mots : « Comme ça, vous pourrez avoir plus rapidement des enfants. » Ça m’a un peu déstabilisée, même si j’avoue que l’idée m’avait également déjà traversé l’esprit, mais plutôt sous la forme de : « Comme ça, je serai une vraie maman épanouie professionnellement, et pas quelqu’un qui essaie de jongler entre début de carrière et début de famille. »
Avec Monsieur Pragmatique, nous avions parlé plus souvent de notre désir d’enfants que de notre potentiel mariage. Il était notoire auprès de nos proches que nous en voulions trois-si-tout-va-bien-et-après-on-fait-le-point à moyen terme.
Il était supposé que nous nous marierions tout naturellement dans l’année qui précéderait la naissance de notre aîné, et que nos fiançailles marqueraient donc le « top départ » de notre « passage à la suite », puisqu’elles représenteraient avant tout notre lancement dans les préparatifs de mariage. Bref, un mariage pas trop défini par les caractéristiques standard d’un mariage, mais plutôt comme une étape à valider avant de pouvoir atteindre celle tant désirée…
Et c’est ainsi que j’ai commencé à m’interroger sur ce que nous voulions vraiment, et ce qui comptait le plus pour nous… La prochaine fois, je te raconte en quoi 2016 a été une année décisive !
Et toi ? Quelle place le mariage occupait-il dans tes plans d’avenir ? Tout s’est-il déroulé comme prévu ? T’es-tu aussi trouvée partagée entre bébé et mariage ? Dis-moi tout…
Mademoiselle Parenthèses
Oh, je suis désolée que tu n’aies pas eu le master qui te tenait à coeur… Bon, j’ai l’impression que tu n’es pas du genre à te laisser abattre, alors c’est chouette d’avoir réussi à rebondir !!
Et j’espère que le chemin tortueux proposait quand même de beaux paysages 😉
Madame Rationnelle
J’étais vraiment partagée, comme je l’ai indiqué. Entre le dépôt de ma candidature et la réception de la réponse, j’avais bien sûr très envie de ce master, de pouvoir reprendre mes études dans la continuité de mon échec en bachelor (suite à quoi j’ai poursuivi mes études en France), et de pouvoir suivre la spécialisation qui me plaisait. Et en même temps, j’angoissais à l’idée de revenir à la case « jeune diplômée fauchée en début de carrière » à l’âge auquel j’aurais aimé fonder une famille (tout en culpabilisant de cette angoisse, et que mon épanouissement intellectuel et professionnel ne soit pas ma priorité).
Aujourd’hui, j’ai un nouveau job qui continuera de m’ouvrir des portes, et un plan bébé à l’horizon. Donc un chemin pas trop désagréable au final !
Madame Néfertiti
Je comprend tellement ta déception mais je suis sûre que le chemin que tu as emprunté était tout aussi beau! Moi je suis un peu plus vieille école mariage d’abord et ensuite les enfants !
Madame Rationnelle
Oui, pour le moment, c’est un détour assez agréable, donc ce n’a pas été une si grosse perte. Mais j’estimais qu’il était essentiel de mentionner nos plans de mariage initiaux et comment/pourquoi on a fini par se marier en 2017.
Nous sommes finalement assez vieille école nous aussi, car nous visions situation stable puis mariage puis bébés, en prévoyant initialement de tout enchaîner en l’espace de quelques mois après la fin de mon master. Au final, nous ne sommes pas mécontents de pouvoir espaacer tout ça sans reculer l’échéance bébé.
Mademoiselle Impatiente
Effectivement, ta déception devait être énorme… Mais je crois beaucoup au destin, et si ça ne s’est pas fait, c’est parce que de meilleures choses t’attendaient !
Hâte de savoir la suite de cette belle histoire 🙂